Le 5 août de l'an sans ère

Publié le 6 septembre 2024 à 17:10

Imaginer au creux de soi, une porte, une porte qui apparait peinte en rouge sanguin, une porte en bois massif bordée d’un relief mastoc qui donne une sensation de lourdeur, de porte infranchissable. En son centre scintille en lettres capitales le mot insécurité qui se projette en flash saccadé, comme un laser armé, dans tout l’espace, mon espace.

 

INSECURITE… INSECURITE… INSECURITE…

 

L’onde propagée se fracasse en poids sur ma poitrine, m’éloignant de la porte. Mon estomac se tord, se déforme, vrille puis s’étire béant vers l’arrière en un trou noir stellaire créant un tourbillon violent vers des gouffres où s’enfouit mon moi malmené dans un vacarme assourdissant d’urgences et de mise en sécurités défaillantes.

 

Non ! Je ne veux plus tomber, sombrer, encore et encore vers ces lieux d’oublis suspendus que mon cerveau obstrue et ensevelie de façon frénétique et compulsive afin de me maintenir en vie. NON ! Je ne veux pas perdre de vue la porte rouge…

 

Je projette mon corps en avant, luttant contre l’aspiration, je tends le bras, ma main saisit la poignée ovale et froide, mes doigts s’agrippent, s’y crispent, je ne lâcherai pas, pas cette fois-ci.

 

Je ferme les yeux, respire lentement, la porte et moi flottons, valsons en deux temps, dans les limbes de mon esprit. Mes doigts se décrispent.

 

J’inspire profondément une première fois, puis une seconde fois, la danse se fige, je suis comme une enfant devant un gigantesque porche pieux… Je tourne, tant bien que mal, la poignée vers la droite, retiens mon souffle, la porte s’ouvre sur un tunnel rond comme un gros boyau, une grotte égout aux parois sombres grouillant d’une végétation racines noueuses qui semble en mouvement. Le temps d’un instant, j’ai peur !

 

J’hésite à passer cette porte-porche qui me semble dorénavant, comme par magie, à taille humain. Une force, une étrange force venue de mes profondeurs, me porte et me dessine en projection lointaine, très lointaine, la fin du tunnel qui s’ouvre sur un havre de paix sécure et lumineux.

 

Un premier pas, puis deux, trois, quatre, cinq, dix, toujours le seuil de la porte, j’avance sans avancer au milieu de ce végétal vasculaire qui agrippe mes vêtements, ma peau… Je redouble d’efforts fais trente pas, cinquante, cent pas, je ne sais plus… J’ai la sensation de me déplacer dans une roue d’hamster étalée, Mon cerveau se jouerait -il encore de moi… Je m’agace, panique, hurle, pleure, manque d’air et m’effondre. Je refuse, réfute.

 

Dans la noirceur de mes troubles, je cherche un repère pour stopper cette espèce de cercle fatal déguisé en boucle au rabais qui me cantonne et m’enferme loin de cet ailleurs que je vise.

 

Toujours les yeux fermés mais à présent immobile comme un roc, mon front se plisse, je sollicite les mémoires de mes lobes temporaux, introspection, j’ai mal à la tête…

 

NON ! Je ne lâcherai pas, pas cette fois-ci. NOOOON !

 

Je veux toucher, caresser, faire corps avec chaque once de mes projections mentales mais rien à faire au plus je plisse mon front au plus les maux de tête se font lancinants et je ne parviens plus à me connecter aux images.

 

La porte, ma porte rouge est toujours là, ouverte derrière moi, devant moi la roue d’hamster tourne toujours, elle tourne à vide dans un décor métallique et froid, le tunnel a disparu.

 

Ajouter un commentaire

Commentaires

Il n'y a pas encore de commentaire.